« Chrétiens africains et ultramarins en migration : tensions culturelles et religieuses »

Journée d’études du CRBC : Chrétiens africains et ultramarins en migration : tensions culturelles et religieuses

Lundi 14 octobre 2024 – 9 Hfaculté de Lettres et Sciences Humaines Victor Segalen – UFR Lettres et Sciences humaines, Brest, bâtiment C, 3e étage, en salle C219.

Cadre et objet de la journée

Cette journée est consacrée à des aspects peu connus des migrations. Si les questions de l’Islam et de son intégration dans une société sécularisée et laïcisée sont depuis longtemps des questions publiques et politiques, celles de la présence de créoles ou d’Africains dans les communautés catholiques ou protestantes génère des tensions plus discrètes mais plus ou moins aiguës et qui modifient parfois substantiellement les « styles » religieux établis. C’est ce que l’on peut observer dans nombre de communautés protestantes « évangéliques » où les migrants sont de plus en plus nombreux, et même dans des paroisses catholiques.

Le phénomène a été étudié méthodiquement dans des paroisses catholiques de Lyon et Paris  sous l’angle des modes d’expressions propres à des migrants et des tensions qu’elles peuvent provoquer parfois avec le clergé et les fidèles habituels
Outre des analyses de terrain et dans le prolongement du travail mentionné ci-dessus, nous introduirons dans cette journée une réflexion illustrée sur l’usage réfléchi de la photographie comme instrument d’objectivation et d’interprétation, qui nous semble utile et féconde pour les terrains « anthropologiques ».

Centrée sur les comportements liturgiques, sans écarter d’autres dimensions, une partie de cette journée s’inscrit dans le champ large des questionnements sur la culture et l’identité. Les pratiques et productions collectives dans la liturgie sont analysées de manière différenciée avec, souvent, des questionnements de premier plan, portant notamment sur des dimensions symboliques fortes, des conflits ou luttes de propriété symbolique, alors que d’autres manifestations, plus discrètes, sont mobilisées de manière plus épisodique, en fonction d’enjeux contextualisés. Divers travaux d’anthropologie culturelle nous montrent à quel point, jusque dans l’intimité infracorporelle, les techniques du corps sont apprises et partagées en groupe. D’autres nombreux travaux indiquent l’importance des codes de civilité et d’interaction.

La prise en compte des tensions internes au clergé suite à la présence non marginale de prêtres africains (mais aussi polonais), permettra de focaliser sur la question du pouvoir et de l’autorité mais aussi sur la maîtrise inégale des codes culturels locaux et traditionnels par ce clergé « remplaçant », et les rapports qu’il entretient avec les autochtones laïcs et prêtres.

Contributeurs

  • Sophie Bava, Marseille
    Socio-anthropologue à l’IRD, membre de l’UMR AMU-LPED, coordinatrice du laboratoire mixte international Movida. Rédactrice de la revue Afrique(s) en Mouvement et chargée de mission Afrique-Méditerranée au sein de l’institut SoMuM.
  • Malik Nejmi, Orléans
    Photographe. Par sa pratique artistique, il a partagé un terrain au Maroc avec les anthropologues Sophie Bava et Bernard Coyault. Ils ont réalisé collectivement l’ouvrage Dieu va ouvrir la mer. Christianismes africains au Maroc, IRD éditions/ Kulte édition, 2022.
  • André Rousseau, Brest
    Sociologue, chercheur associé au CRBC. Il est notamment l’auteur de Pour une sociologie de la crise catholique. France, 1960-1980, CRBC éditions, 2015.
  • Corinne Valasik, Paris
    Enseignante-chercheuse, maîtresse de conférences en sociologie, doyenne honoraire de la faculté des sciences sociales, économiques et de droit de l’Institut catholique de Paris, membre du laboratoire de recherche Groupe Société religions Laïcité GSRL-CNRS. Elle est notamment l’auteure de « Les prêtres africains en France : de nouveaux missionnaires ? », in Valérie Aubourg, Jacques Barrou et Cécile Campergue (éds.), Migrants catholiques en France. Ancrages sociaux et religieux, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble Alpes, 2022, pp. 40-54.
  • Benjamin Vanderlick, Brest
    Ethnologue et photographe. En qualité de photographe, il a été associé à l’ANR ReliMig coordonné par Valérie Aubourg (2016-2021). Avec Valérie Aubourg ils ont publié l’ouvrage de recherche et de photographie Dieu Merci, expressions catholiques africaines et créoles, éditions Libel, 2021.
  • Valérie Aubourg, Lyon
    Ethnologue et professeure (HDR) de l’Université Catholique de Lyon où elle dirige l’UR CONFLUENCE : Sciences et Humanités (EA 1598). Elle conduit par ailleurs un projet de recherche collaboratif au sujet des populations catholiques issues de la diaspora et de la migration. Elle est membre associée du Groupe Sociétés, Religions, Laïcités (CNRS-EPHE) et fellow à l’IC Migrations (institut convergence des migrations). Elle est coéditrice de l’ouvrage Migrants catholiques en France. Ancrages sociaux et religieux, Presses Universitaires de Grenoble, 2023.
  • Bernard Coyault
    Anthropologue, chercheur associé à l’Institut des Mondes Africains. Il travaille sur les dynamiques religieuses des parcours migratoires, la pluralisation religieuse en Afrique subsaharienne.

Retour sur l’Interfestival des religions et des convictions : « L’art nous rend-il plus vivant ? » Mille et une voies d’éveil spirituel.

L’art nous rend-t-il plus vivant ? introduction de Laurent GRZYBOWSKI

Depuis l’époque préhistorique, l’être humain est un artiste dans l’âme. Des grottes de Lascaux aux cathédrales gothiques, des hiéroglyphes égyptiens aux temples incas, des statues de l’île de Pâques aux sept merveilles du monde, en passant par l’Alhambra de Grenade, d’innombrables œuvres picturales et architecturales témoignent de la beauté et de la richesse de notre histoire. Comment ne pas citer également les chants du monde ou les œuvres musicales de Mozart ou de Jean-Sébastien Bach ; les écrits d’Ibn Arabi ou de Victor Hugo, des mystiques, des poètes, des écrivains ; les créations théâtrales, chorégraphiques ou cinématographiques qui ont marqué notre histoire, sans oublier la photographie, la calligraphie, la bande dessinée, la sculpture ou l’art de la mosaïque.

L’occasion pour moi de remercier deux artistes présents parmi nous ce matin (deux artistes parmi d’autres) et tout au long du week-end. Ils animeront d’ailleurs chacun de leur côté un atelier : Chouki Derrouiche, sculpteur musulman ouvert à toutes les traditions spirituelles, qui sont pour lui autant de sources d’inspiration, et Sr Samuelle, religieuse catholique, mosaïste. Un grand merci à elle, à eux, d’avoir accepté d’exposer quelques-unes de leurs œuvres. Il y a un autre artiste que j’aimerais d’ores et déjà remercier : José Gurdak, pianiste et compositeur de musique, qui animera lui aussi un atelier de « sculpture musicale » avec Edith Fortin, chanteuse et psychomotricienne. Merci à eux !

L’art donne de l’éclat à la vie car avant d’être une activité culturelle, il est une activité de l’esprit. « Puissance spirituelle, il est le langage de l’âme », affirmait le peintre Kandinsky. Il éveille et transforme notre être intérieur. Au centre de toutes les religions, il incarne la puissance de représentation qui rapproche les humains des dieux ou de Dieu. « Tremplin vers l’Absolu », selon Hegel, il est aussi un remède de la vie affectée par les troubles, les malheurs et les angoisses de l’existence. Parce qu’il donne sens à notre vie et nous permet de goûter autrement notre quotidien, il vient souvent nous relever.

En novembre 2019, l’Organisation mondiale de la santé publiait un rapport qui affirmait pour la première fois l’impact bénéfique de l’art sur notre santé physique et mentale. Reposant sur 900 articles scientifiques, il stipulait que les activités artistiques étaient déterminantes pour notre épanouissement depuis notre conception à l’âge avancé, et devraient être généralisées aux cotés des protocoles thérapeutiques en milieu hospitalier, dans l’éducation mais aussi dans la vie de tous les jours pour améliorer notre bien-être.

Un an plus tard, le monde entier faisait face à l’épidémie de la Covid-19. Une crise qui provoqua des dégâts sanitaires, économiques et sociaux sans précédent et qui affecta durablement la santé mentale et psychique de beaucoup de nos concitoyens. « En limitant l’accès à l’art, on tue ce qui donne envie de vivre », explique le neurologue Pierre Lemarquis auteur d’un livre intitulé « L’art qui guérit ». En s’appuyant sur de nombreux exemples de l’histoire de l’art, de la philosophie et de la recherche médicale, l’auteur explique les étonnants pouvoirs de l’art sur notre bien-être, sur notre développement intellectuel et même sur certaines pathologies.

Selon la formule consacrée, l’art ‘sculpte et caresse’ notre cerveau. Car, pour ce neurologue, nous avons deux cerveaux. Une partie qui capte les informations qui nous entourent, qui les compare à ce que l’on a en mémoire, et avec laquelle on décide d’agir sur le monde en fonction des informations qu’on vient de recevoir. On agit pour rester en vie, ce que pourrait aussi bien faire un ordinateur. Mais, dans notre cerveau, nous avons une autre partie, moins rationnelle et plus archaïque, celle du plaisir et de la récompense.

L’art agit sur les deux : il sert à élargir notre état d’esprit, à nous apprendre de nouvelles choses, il agit sur la plasticité cérébrale et donc sculpte notre cerveau. Mais il agit aussi sur nos émotions, il caresse notre cerveau et stimule les hormones responsables du plaisir et de l’attachement : la dopamine, la sérotonine, l’ocytocine et la morphine endogène. Les 4 hormones du bonheur. Hormones que l’on active aussi en pratiquant un sport ou en se faisant des câlins. Or, ces hormones nous donnent envie de vivre. Les effets bénéfiques de l’art sont avérés depuis l’Antiquité. Dans la Grèce antique, Aristote évoque la libération des passions du spectateur grâce aux acteurs de théâtre. C’est ce qu’on appelle la catharsis. Notre ami metteur en scène Laurent Poncelet pourra nous en parler.

Retrouver le goût de vivre, c’est ce qui a fait des arts – et notamment de la musique – les activités parmi les plus plébiscitées au tout début de la crise sanitaire, et notamment pendant le premier confinement. On a même parlé de pandémie musicale, alors que se constituaient spontanément des formations musicales entre membres de familles confinées, voisins ou musiciens privés de scène par le biais du numérique. Plusieurs études ont démontré l’importance de la musique pour de nombreuses personnes pendant le premier confinement, notamment celle de l’Université McGill de Montréal, selon laquelle la musique est arrivée à la première place des activités pratiquées, avant la conversation avec des amis ou la cuisine.

« Non seulement la musique a été plus fréquemment citée comme activité refuge pour lutter contre le stress pendant le confinement, mais plus la pandémie avait un impact sur les gens, à cause de la perte d’un proche, des problèmes financiers, ou de l’isolement, plus ils se tournaient vers la musique, et moins ils étaient déprimés, » explique Emmanuel Bigand, neuropsychologue à l’Université de Bourgogne. « La musique est une caresse. Elle peut réguler notre humeur, modifier la biochimie de notre cerveau, et notamment réguler la sécrétion du cortisol, hormone du stress. On peut vraiment reprendre le courage et se sentir revitalisé. La musique est une super médecine non-invasive, » résume le spécialiste.

Et si la musique a rencontré une telle adhésion pendant la crise du Covid, c’est aussi parce qu’elle a répondu à nos besoins fondamentaux de connexion avec les autres. « Faire de la musique avec d’autres permet à nos cerveaux de se synchroniser. Cette synchronisation change la relation sociale, l’empathie que l’on a avec l’autre, la personne nous parait beaucoup plus sympathique et on rentre dans une relation de collaboration. Cette relation d’attachement à l’autre est un besoin de tous les instants de la vie de l’être humain, mais s’accentue en période de crise. Le fait de se synchroniser avec les autres brise notre isolement et nous redonne confiance, » conclut le chercheur.

J’échangeais hier dans la voiture avec Christèle Daire, du Secours catholique qui, me faisant part de son expérience avec les personnes en précarité ou cabossées par la vie qu’elle rencontre, me disait que la création artistique, en l’occurrence l’expression théâtrale, était un formidable moyen de découvrir les trésors enfouis en soi. L’activité artistique nous permet de devenir plus authentique. Au contact de la matière, qu’il s’agisse d’un instrument de musique, d’une palette de couleurs, d’un burin, d’un pinceau, d’une pierre ou d’un morceau de terre, d’un stylo ou d’un appareil photo, nous découvrons qu’il est impossible de tricher avec soi-même. L’art nous permet finalement de cultiver notre intériorité. Et d’exprimer à la fois nos rêves et nos révoltes. Les rêves et les révoltes, nos désirs les plus profonds et nos cris de détresse, tels sont les deux piliers de l’engagement. Pourraient-ils être aussi les deux piliers de l’acte créateur ?

Révélatrice de notre humanité, l’expression artistique permet de mieux se comprendre et de mieux comprendre les autres. L’art n’a pas de pays d’origine, pas de religion, il est universel. Il rapproche et unit les femmes et les hommes du monde entier. Nul besoin de connaître une langue étrangère pour décrypter, interpréter et savourer une œuvre d’art. Elle parle d’elle-même. Elle ne dira pas la même chose aux uns, aux unes et aux autres, mais elle parlera. Peut-être parce qu’elle touche à ce qu’il y a de plus humain en nous. Je me souviens de cet entretien passionnant que j’ai eu il y a quelques années avec un grand paléoanthropologue, Pascal Picq, auteur de nombreux ouvrages sur la question.

Dans cet entretien, il m’expliquait que le propre de l’être humain n’était ni le rire, ni l’outil, mais sa capacité d’innovation et d’imagination. Je le cite : « Ce ne sont pas les inventions qui caractérisent le génie humain, mais la manière de les articuler. C’est le principe même de l’innovation. L’être humain est devenu humain en intégrant ses inventions dans une synthèse créatrice et en développant des capacités d’innovation transformatrice. Capacité aussi à se transformer lui-même, à modifier son apparence, à agir sur son corps : la cosmétique, les tatouages, les scarifications, l’usage des parures et des colorants sont des activités proprement humaines. Avec lui, l’imagination devient une force de transformation » (…) « Ce qui nous distingue des grands singes, ce ne sont pas les outils, c’est notre imaginaire. Une formidable force de transformation, capable d’inventer l’avenir. » Incroyable mais vrai ! L’être humain est capable de faire de son corps, de sa vie, de son environnement une œuvre d’art…

Chemin vers soi, chemin vers l’autre, l’art peut nous aider à créer des liens et à vivre ensemble. Il peut aussi contribuer à nous guérir, à nous remettre debout. En ce sens, peut-on dire qu’il nous rend plus vivant ? L’humanité pourrait-elle vivre ou survivre sans expression artistique ? Qu’en disent les grandes traditions religieuses, à travers leurs rites, leurs textes et leurs pratiques ? Autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre au cours de ce week-end. En commençant ce matin par un dialogue des pensées et des écritures. Je vous souhaite un excellent interfestival des religions et des convictions. Que ce week-end soit pour chacune et chacun d’entre vous un moment de renouvellement, un moment d’émerveillement, un moment plein d’émotions, intense et vrai, placé sous le signe de la joie ! Je vous remercie pour votre attention.

Laurent Grzybowski

réécouter les interventions : https://www.abbaye-st-jacut.com/mediatheque

Le festival en photos :

2024-01-27a, Inter festival des Religions &Convictions https://photos.app.goo.gl/yWuZsCLCBrvysUSK8

2024-01-27a, Inter festival des Religions &Convictions https://photos.app.goo.gl/n1dozF34h4GhsJATA

2024-01-27b, Inter festival des Religions Saint-Jacut22 https://photos.app.goo.gl/ueJMnSHbZSsCqbPW8

2024-01-27.28c, Inter festival Saint-Jacut22   https://photos.app.goo.gl/M6kboJ5iScVTkGnv7

L’identité bretonne s’est-elle substituée au catholicisme ?

  1. Pourquoi ce livre et comment ?

un projet collectif qui devient individuel avec des bases qui permettent de le réaliser.

– idéologie, authenticité, nationalisme soft

J’applique aux discours sur la Bretagne la définition de l’idéologie donnée par le Centre national de ressources textuelles et lexicales  : « Ensemble plus ou moins cohérent des idées, des croyances et des doctrines philosophiques, religieuses, politiques ». (Centre national de ressources textuelles et lexicales)

Daniel Le Couédic, « idée bretonne » : somme des constructions intellectuelles qui prêtent à la Bretagne des caractéristiques ou un rôle incomparables »

– le sommaire

  1. Une thèse et les questions qu’elle pose

« Sociologue des religions, André Rousseau avance une hypothèse qui me paraît très féconde. Dieu est mort en Bretagne mais les Bretons ne peuvent s’empêcher de croire… Ils auraient donc fait un transfert. Dorénavant, c’est en la Bretagne qu’ils croient. Ils chantaient « Catholiques et Bretons toujours », ils entonnent dorénavant: « Bretons toujours ! »  (Jean Lebrun, France Inter, 17 mars 2023)

2-1 – Il faut partir de la place historique du catholicisme en Bretagne : la culture catholique a imprimé sa marque sur le régionalisme breton

– Rome fut « capitale de la Bretagne », mais sa puissance s’est effacée dans tous les domaine tout en laissant un leg sécularisé : langue, culture, dynamisme économique, esprit de corps

– comme ailleurs, l’effacement a libéré l’espace pour d’autres : la raison économique et le celtisme

– plus personne ne s’étonne que les bretonistes  parlent de « la France » ou de « la République » comme de réalités extérieures, ne voient de « roman national » que hors de la Bretagne et contre elle…

– du catholicisme il  reste surtout une « tonalité » : toute idée devient combat et mission ; illustration du « catholicisme » zombie de Le Bras et Todd

2.2. Des questions : avant de compléter cette thèse voici des précisions sur la manière dont je parle de religion

  1. Quelques mots sur la vision sociologique de la religion
  2. Religion : qu’entend-on par là quand on suggère que le bretonisme est devenu la religion de la Bretagne ?

– Formes Elémentaires de Durkheim ou « scrupule rituel » romain décrit par John Scheid ?

  1. L’idéologie bretonne, une forme de déplacement de la religion. Métaphore : La religion plus ou moins marginalisée doit entreprendre un travail de traduction. Dieu tout puissant devient « Dieu puissant d’amour ».

Si le catholicisme emprunte à l’air du temps des schèmes qui le rendent compréhensible cela implique que ces schèmes peuvent très bien fonctionner comme religion de substitution.,

Les piliers de l’idéologie bretonne ont curieusement trait à la tradition, la mémoire, au lien social, à la vocation d’un collectif.

  1. Du bretonisme considéré comme une forme du « religieux disséminé dans le social » (Danièle Hervieu-Léger) comment cela s’est-il fait ?
  2. Cette thèse d’un transfert du catholicisme implique de modifier la définition durkheimienne de la religion :

« Une religion, est un système solidaire de croyances et de pratiques relatives à des choses sacrées, c’est-à-dire séparées, interdites, croyances et pratiques qui unissent en une même communauté morale, appelée Église, tous ceux qui y adhèrent » (Les Formes élémentaires de la vie religieuse)

DHL La Religion pour mémoire, Cerf, 1993, p.119 : « une religion est un dispositif idéologique, pratique et symbolique par lequel est constituée, entretenue, développée et contrôlée la conscience (individuelle et collective) de l’appartenance à une lignée croyante particulière ». 

Et p. 127 « on appellera tradition l’ensemble des représentations, images, savoirs théoriques et pratiques, comportements et attitudes qu’un groupe ou une société accepte au nom de la continuité nécessaire entre son passé et son présent »…. « Avec la capacité  d’y incorporer des innovations et réinterprétations qu’exige une conjoncture. »

Pour ce qui concerne la « croyance » : Comme l’a montré Émile Benveniste  la «« foi » désigne non pas l’attitude du croyant, mais « l’assurance qu’il tire d’une propriété qu’il prête à l’objet de sa croyance »[1]. C’est ce mécanisme qui fait du bretonisme et du « celtisme » une évidence. Et une foi. On peut voir à l’œuvre semblable dispositif dans « l’identité ».

D’après Yvon Tranvouez, dans Catholiques en Bretagne au XXème siècle, p.53-70

Celtes d’abord

Ropartz Hémon : très peu de catholiques autour de lui et du mythe celtique, sauf autour de 1940.

 L’abbé Perrot ne supporte pas ce paganisme

 

Bretons d’abord

Abbé Perrot : revue Feiz ha Breiz

Franchement régionaliste mais son nationalisme est hésitant à cause de l’hostilité de Duparc. Beaucoup de monde autour de lui – Bleun Brug, journal O lo lê

Catholiques d’abord

Mgr. Duparc

C’est le groupe de loin le plus nombreux ; seulement régionaliste pour la culture et la langue et la fierté bretonne (« race » exceptionnelle – au sens de « racé ».

Pétainistes puis de moins en moins

 

Républicains d’abord

Francis Gourvil (1889-1984)

Féru de celtisme quitte le parti nationaliste ; durant la guerre,  proche de la résistance. La question bretonne entre parenthèse.

Cette minorité deviendra majorité après la guerre ; se situant au centre droit et devenant gaulliste.

[1] Le Vocabulaire des institutions européennes, op. cit. Voir le chapitre 8, « Fidélité personnelle », p. 103 et suiv., et surtout le chapitre 15, « Créance et croyance », p.  171-180. 

 

L’accès des femmes à l’autorité religieuse. Changements, résistances et controverses

Conférences de Credi 29 : Credi 29 vous invite à la prochaine conférence de :

Céline Béraud

L’accès des femmes

à l’autorité religieuse.

Changements, résistances et controverses

On pointe volontiers pour la dénoncer la dimension patriarcale du judaïsme, du christianisme et de l’islam. Au sein de ces mondes religieux, l’exercice de l’autorité est longtemps demeuré et demeure, pour une grande part encore, le monopole des hommes.

Dans cette conférence, on s’attachera à saisir les facteurs favorables à l’accès des femmes à des positions qui leur étaient jusqu’alors inaccessibles (pastorat, rabbinat ou encore imamat mais aussi, plus modestement et plus fréquemment, enseignement de la religion ou aumôneries des institutions publiques). Mais on analysera aussi les résistances et controverses parfois très vives que cela suscite. On verra ainsi comment ces questions de genre travaillent aujourd’hui de l’intérieur les mondes religieux et se reflètent dans leur pluralité interne.

Avec le soutien de l’Université de Bretagne Occidentale (UBO)

Céline Béraud est sociologue, directrice d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales. Elle a notamment publié Le catholicisme français à l’épreuve des scandales sexuels (Seuil, La République des Idées, 2021) et La bataille du genre. Du mariage pour tous à la PMA (Fayard, Raison d’agir, 2021).

Notes prises lors de la conférence

Mardi 20 février 2024, à 20H, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines Victor Segalen, 20 rue Duquesne à Brest. 

Semaine de prière pour l’unité chrétienne 2024

Semaine de prière pour l’unité chrétienne

Chaque année, le principal temps fort œcuménique demeure la « Semaine de prière pour l’unité chrétienne » qui, depuis 1908, rassemble des chrétiens de toutes confessions du 18 au 25 janvier. Le thème de 2024 : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu… et ton prochain comme toi-même. »

Ce sont les chrétiens du Burkina Faso qui ont choisi le thème de la prochaine Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, du 18 au 25 janvier 2024.

Les chrétiens sont appelés à agir comme le Christ en aimant comme le Bon Samaritain, en montrant de la pitié et de la compassion pour ceux qui sont dans le besoin quelle que soit leur identité religieuse, ethnique ou sociale. Ce qui doit nous inciter à venir en aide aux autres, ce n’est pas l’identité commune, mais l’amour de notre «prochain». Toutefois, la vision de l’amour de notre prochain que Jésus nous présente est battue en brèche dans le monde d’aujourd’hui. Guerres dans beaucoup de régions, déséquilibres dans les relations internationales et inégalités causées par les ajustements structurels imposés par les puissances occidentales ou par d’autres agents extérieurs inhibent notre capacité d’aimer comme le Christ. C’est en apprenant à s’aimer les uns les autres au-delà de leurs différences que les chrétiens peuvent devenir des « prochains », comme le Samaritain de l’Évangile.

Retrouvez ci dessous quelques propositions dans le Finistère.

Presque île de Cozon

Samedi 20 janvier : temps de rencontre avec nos frères Protestants de la Presqu’île, à Argol,

  • un temps de partage de l’Evangile de Luc
  • un temps de rencontre amicale autour d’un goûter
  • la messe de 18h00, au cours de laquelle la prédication et la prière universelle seront assurées par nos frères chrétiens.

Quimper

Vendredi 19 janvier -18H30 – célébration œcuménique avec invitation à la cène, au Temple, rue de Kergariou, Quimper

Samedi 20 janvier -18H30 – vêpres orthodoxes à la chapelle de Cuzon, Quimper

Dimanche 21 janvier -16H – vêpres œcuméniques à la cathédrale St Corentin, Quimper

Samedi 27 janvier -18H – Espérer aujourd’hui ? conférence de Frédéric Rognon, au Temple, rue de Kergariou, Quimper

Morlaix

mardi 23 janvier 2024 -20H – célébration œcuménique au temple baptiste au 32 de la rue de Paris

Pont l’Abbé

Jeudi 18 janvier – 18H30 – prière œcuménique à l’église de Tréméoc

L’Idéologie bretonne, Entre authenticité et nationalisme soft

L’idéologie bretonne

Entre authenticité et nationalisme soft

de André Rousseau

Pourquoi la théâtralisation permanente de l’identité régionale rencontre-t-elle en Bretagne un accueil enthousiaste jamais démenti ? Pour répondre à cette question, ce livre s’intéresse aux acteurs qui depuis près de deux siècles tentent de transformer la situation de périphérie dominée de la Bretagne en une « question bretonne ». Les discours et projets nommés ici « idéologie bretonne » présentent trois constantes : le dessein de valoriser un peuple différent, sa langue et sa littérature, en se fondant sur leur caractère celtique ; la volonté plus ou moins affirmée de rompre avec la culture française en produisant un récit breton concurrent du roman national ; enfin, un consensus à propos de l’exceptionnalité de la Bretagne. Le terme « idéologie » résume – mieux que celui d’identité – l’ensemble des croyances, traditions plus ou moins réinventées que des acteurs divers et en concurrence orchestrent depuis environ 180 ans. Ce livre analyse cette idéologie à l’oeuvre dans les politiques publiques régionales (langue et culture bretonnes) et il suggère que le bretonisme n’est pas sans combler le retrait sensible de la catholicité dans cette région. En somme, l’idéologie bretonne compense par l’émotion le désenchantement du monde, et demeure en deçà d’un projet politique, au grand regret des autonomistes.

RELIGIONS ET ECOLOGIE

Conférences de Credi 29 : Credi 29 vous invite à la prochaine conférence de :

Frédéric Rognon

 Religions et écologie

Les relations entre religions et écologie sont  foncièrement ambivalentes. Les traditions théologiques et spirituelles des religions, leurs textes de référence, leur anthropologie, leurs rites, présentent, on le montrera, autant de freins que de précieuses ressources pour la prise en compte des défis environnementaux et de l’avenir de la planète. L’exemple du protestantisme est à ce titre emblématique : souvent associé au capitalisme (et par conséquent à la première forme de productivisme), il est également à l’origine des premiers embryons de résistance au saccage de la Création (premiers parcs nationaux, premières campagnes de lutte contre la vivisection ou contre la construction de barrages, premières sociétés végétariennes). Nous essaierons de comprendre comment une même tradition religieuse peut représenter à la fois un poison et un antipoison pour le bien-être des générations futures. Loin de toute pensée binaire, nous poserons donc la question des relations entre religions et écologie sur un mode foncièrement dialectique.

Avec le soutien de l’Université de Bretagne Occidentale (UBO)

Frédéric Rognon est professeur de philosophie à la Faculté de théologie protestante de l’Université de Strasbourg.
Il a publié avec Christophe Monnot : « Eglises et écologie. Une révolution à reculons » (Labor et Fides, 2020) et  « La nouvelle théologie verte » (Labor et Fides, 2021).

Notes prises lors de la conférence

Mardi 30 mai 2023, à 20H, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines Victor Segalen, 20 rue Duquesne à Brest. 

Critique scientifique et conviction religieuse, quelle autonomie ? quelles rencontres ?

Conférences de Credi 29 : Credi 29 vous invite à la prochaine conférence de :

François Euvé :

Critique scientifique et conviction religieuse

quelle autonomie ?

quelles rencontres ?

La vision scientifique moderne du monde laisse peu de place à l’intervention d’un Dieu Créateur. Cela est vrai à l’échelle du cosmos (Galilée), mais aussi dans le monde vivant (Darwin). De nouvelles théories en physique fondamentale tendent à critiquer la vision purement mécaniste qui régnait dans la science classique, voire à « réenchanter » le monde, ce qui recoupe les aspirations de plusieurs courants écologistes. Le but de cette conférence sera de mieux situer les partenaires en présence, en s’aidant d’une lecture historique. On montrera en particulier ce qui caractérise la science moderne et comment elle s’est constituée à partir de propositions théologiques. La distinction des plans est cohérente avec la tradition chrétienne. On montrera aussi que le réductionnisme scientifique est insuffisant et que notre approche du monde a tout à gagner à s’appuyer sur une pluralité de perspectives.

Avec le soutien de l’Université de Bretagne Occidentale (UBO)

François Euvé, jésuite, est ancien élève de l’ENS (Cachan), agrégé de physique et docteur en théologie, professeur de théologie fondamentale et dogmatique. Rédacteur en chef de la revue Études, membre du Conseil de rédaction des Recherches de Science Religieuse, membre du Conseil de la Fondation Teilhard de Chardin.

Avec Etienne Klein, lui-même physicien, il a écrit le livre : « La science, l’épreuve de Dieu ? » (Salvator, 2023)

Jeudi 4 mai 2023, à 20H, à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines Victor Segalen, 20 rue Duquesne à Brest. 

Compte rendu de la conférence témoignage d’un tchadien, Fortunat ALATARAT

Une soixantaine de personnes sont venues écouter le partenaire tchadien du CCFD-Terre Solidaire, jeudi soir à la salle Jean Monnet à Guipavas.

Ce tchadien, Fortunat Alatarat, est responsable bénévole de l’association GRAVE  (Groupe de Recherche et d’Animation du Vivre Ensemble) créée en 2016 sous l’impulsion du CCFD pour avancer sur le chemin de la réconciliation entre les musualmans arabophones du Nord et les chrétiens francophones du Sud. En proie à la violence et à des conflits incessants depuis la fin de la colonisation en 1960, dirigé par des hommes corrompus et motivés par le seul enrichissement de leur clan, ce pays est parmi les plus pauvres au monde et a besoin de retrouver la paix et la concorde pour avancer sur la voie du développement.

Fortunat a su captiver son auditoire qui a pris conscience des difficiles conditions de vie dans ce pays. Par exemple, Fortunat, enseignant en école publique, a des classes de terminale de plus de 120 élèves ! Et seulement un enseignant sur deux assure ses cours, les autres touchant le salaire sans remplir la fonction…

Fortunat a exposé les actions du GRAVE, avec ses succès et ses impasses.

Un travail fructueux est mené avec les écoles coraniques. Dans ces écoles, les maîtres, autoproclamés et sans formation, envoyaient leurs élèves mendier, afin de payer leur « scolarité », et pratiquaient des châtiments corporels.  Ces enfants maltraités étaient ensuite des proies faciles pour les mouvements djihadistes qui les recrutaient comme combattants. Fort de ce constat reconnu par tous, le GRAVE a obtenu que, dorénavant, les maîtres reçoivent une formation avant d’enseigner et suivent un programme pour assurer à leurs élèves un apprentissage élémentaire, lire et écrire l’arabe, compter, etc… en plus de la découverte du Coran. Et ce ne sont plus les enfants qui doivent payer leur scolarité mais leurs parents !

Pour lutter contre les préjugés, fauteurs de haine, le GRAVE agit auprès des chefs religieux, des jeunes et des femmes en créant des groupes d’échanges. Apprendre à se connaître et se découvrir proches par delà les différences de religion, permet de monter ensuite des projets au service du bien commun.  Ainsi, les femmes ont pris en main la gestion des greniers communautaires pour tenir pendant la période de soudure entre deux récoltes, ce qu’elles font très bien, contrairement aux hommes qui vivaient au jour le jour !

Dans deux domaines, le GRAVE n’obtient pas d’avancée jusqu’à présent :

La reconnaissance des enfants nés hors mariage : les jeunes musulmans qui engrossent des jeunes chrétiennes, nient ensuite toute responsabilité, au grand dam des familles de ces jeunes filles. D’ailleurs, les musulmans tchadiens mettent parfois la loi musulmane, la charia, au-dessus de la loi civile du pays.

Les conflits entre éleveurs et agriculteurs n’obtiennent pas de solution. Les éleveurs, souvent de riches propriétaires du Nord, embauchent des bergers et les arment, si bien que ceux-ci ne respectent aucun couloir de transhumance et laissent les bêtes pâturer sur les terres agricoles.

Fortunat a mentionné l’implication des évêques tchadiens qui n’hésitent pas à rappeler les uns et les autres à leurs responsabilités. Il a aussi laissé entendre son espoir de voir la société civile gagner en esprit critique et exiger de ses dirigeants de se mettre réellement au service du pays.

Message de Mgr Norbert Turini aux musulmans, pour le Ramadan 2023

A l’occasion du mois du ramadan, la conférence des évêques de France (CEF) a envoyé un message aux membres de la communauté musulmane

Message de Mgr Norbert Turini aux musulmans, pour le Ramadan 2023/ 1444 H.

Chers amis,

Voici venu, pour vous, le mois sacré du Ramadan au cours duquel vous pratiquez le jeûne et d’autres efforts spirituels dans la foi, la prière et le partage. Depuis quelques semaines déjà, les catholiques ont commencé eux aussi, par le Carême, la préparation de la fête de Pâques en cherchant à se rapprocher de Dieu dans la prière, le repentir et le renoncement au superflu. Dieu mérite que nous le cherchions et que nous le servions de tout notre cœur. Et nous confessons, dans nos religions respectives, que Dieu reçoit notre démarche sincère avec une immense miséricorde.

C’est donc avec une très fraternelle amitié que je vous prie d’accepter mes souhaits de bon Ramadan, de « Ramadan bienfaisant » selon l’expression traditionnelle .رمضان كريمJe vous les envoie de la part des catholiques de France et de tous les évêques, et j’espère que ce chemin d’approfondissement de nos vies spirituelles affermira notre désir de servir le Maître de l’Histoire, le Créateur de l’Univers, et qu’il nous conduira à collaborer ensemble pour aider ce monde à retrouver la paix, à développer la solidarité et à chérir la vie.

En France, le Service National pour les Relations avec les Musulmans de la Conférence des Evêques de France, fête cette année son cinquantième anniversaire. Catholiques de France, nous sommes fiers d’avoir œuvré pour une fraternité concrète et respectueuse des croyances de chacun au cours des décennies passées. Notre Eglise a essayé de faire de son mieux pour connaître les musulmans en vérité, pour leur témoigner sa solidarité. Et nous vous remercions d’avoir accepté de construire cette relation avec nous, le plus souvent par le voisinage et les amitiés locales. Les condoléances envoyées aux catholiques par plusieurs personnalités musulmanes, au moment du décès du Pape émérite Benoît XVI, nous ont aussi beaucoup touchés.

Continuons à construire cette fraternité ensemble, sans nous laisser décourager par les circonstances, ni par les vents contraires.

Vous redisant mes meilleurs vœux, je vous assure aussi de mon amitié et vous souhaite, par avance, une heureuse fête de l’Aïd el-Fitr.

+Norbert Turini, Archevêque de Montpellier,

Président du Conseil pour les Relations Interreligieuses et les Nouveaux Courants Religieux, Conférence des Evêques de France