Notes prises lors de la rencontre débat sur Rudolph Steiner

Le 10 octobre 2018 Credi 29 a accueilli Antoine Dodrimont∗ dans le cadre d’une rencontre débat autour de la personnalité de Rudolph Steiner, penseur spiritualiste. Vous trouverez ci-dessous quelques notes prises lors de son exposé :

Rudolph Steiner est né en 1861, dans l’empire Austro-hongrois, dans ce qui est la Croatie aujourd’hui. Sa famille n’était pas aisée, ce qui expliquera son intérêt pour le monde ouvrier. A 8 ans il découvre la loi de cause à effets en observant un moulin et 30 ans plus tard, il fera de l’observation et du « penser » la base de la connaissance de l’esprit.

Il fait une première expérience supra sensible dans une salle d’attente de gare en voyant une apparition d’une tante décédée. Il commence à voir des êtres de la nature et se considère comme citoyen de deux mondes, l’un matériel, l’autre supra sensible. En 1869, sa famille déménage en Autriche. Il entreprend des études scientifiques et techniques. En faisant de la géométrie, il fait une nouvelle expérience suprasensible qui lui procure un bonheur.

A 15 ans il lit « la critique de la raison pure » de Kant auquel il reproche de limiter la connaissance du monde sensible extérieur aux perceptions sensorielles. Pour lui, il n’y a pas de limites aux possibilités de l’esprit humain pour découvrir le monde, idée confortée par la rencontre d’un cueilleur de simples. Il pose la question d’une pensée capable de réaliser à la fois la connaissance des phénomènes naturels et spirituels ?

Il poursuit ses études à l’école polytechnique de Vienne et découvre Goethe et l’œuvre scientifique de celui-ci. Il trouve en Goethe un compagnon de route et un peu plus tard participera à l’édition des œuvres scientifiques de celui-ci.

En 1884, devient précepteur dans une famille et s’occupe d’un enfant hydrocéphale. En 1888, il publie un « credo » : il existe 4 sphères de l’activité humaine sans lesquelles l’homme ne vit pas : la connaissance, l’art, le dévouement, la religion.

En 1894, il publie « Philosophie de la liberté », livre qu’il considèrera toujours comme le plus important de son œuvre. L’idée de Steiner est qu’en accédant à un état supérieur de conscience, l’homme peut, par la pensée, découvrir le monde supra sensible, l’idée derrière le phénomène. Il propose pour cela d’utiliser une démarche scientifique.

Il dit avoir découvert la vie de Jésus, non à partir des évangiles, mais à partir de ses propres expériences de penser. Pour lui seul importe le Christ spirituel qui se donne par grâce. Il fait des conférences sur « le christianisme comme fait mystique et les mystères de l’antiquité » (dont il fera un livre) devant la société théosophique. Pour Steiner, mystique égal spirituel et le fait christique a pour but de permettre à l’humanité de rentrer dans le monde spirituel. Il devient membre de la société théosophique dans le but de développer sa recherche sur la science de l’esprit pour acquérir des connaissances des mondes spirituels. Il la quittera en 1913 pour fonder la société anthroposophique.  A partir de 1906, il fait intervenir l’art pour se rapprocher du monde spirituel, ce qui donnera en particulier naissance à l’eurythmie ou art du mouvement.

Sa rencontre avec Albert Schweitzer en 1902 sera marquante pour tous les deux, mais s’ils s’entendent sur la décadence spirituelle de la civilisation, Rudolph Steiner rejette complètement les recherches de Schweitzer sur le Jésus historique.

L’origine des religions selon Rudolph Steiner : il y a eu une époque où les hommes vivaient en symbiose avec les dieux et n’avaient pas besoin de religion puisque qu’il y avait un contact direct. La religion est devenue nécessaire quand les hommes sont partis du domaine divin : la chute est l’entrée des hommes dans la vie matérielle physique, ce que raconte la Genèse (Adam succombe à la tentation dans une semi-conscience). Les hommes devaient quitter le monde des dieux pour acquérir la liberté. Les hommes ont alors dû subir les conséquences de la chute et la nécessité de la venue du Christ pour restaurer l’être humain dans ses prérogatives divines. Pour rétablir la communication, les dieux inventent la religion qui serait née en Inde (Védas). Les religions se sont diversifiées pour répondre à la psychologie et aux besoins des peuples différents. Les initiés vont travailler pour connaitre la volonté divine et la transmettre par les mythes, les légendes, les rites, les cultes, les prières…

L’essence de la religion : le monde divin n’est pas de nature terrestre, l’être humain a en lui du spirituel. La religion a pour but de mettre en relation le spirituel qui vit dans l’homme et le spirituel qui vit dans les cieux.

Le siège de la religion est le cœur. La foi religieuse se vit dans l’être psychique et n’est pas du domaine de l’intellect.

Pour conclure, voici en quels termes Antoine Dodrimont présente Rudolph Steiner : « Pour comprendre Rudolf Steiner (1861-1925), il convient de partir de l’hypothèse qu’il fut, comme il l’a dit lui-même, citoyen de deux mondes: l’un matériel et sensible, l’autre spirituel et suprasensible. Au cours de sa vie, il s’efforça d’établir un pont entre eux à partir de la raison humaine. Il le fit en toute liberté individuelle. A partir d’une telle conscience, il s’efforça de relier, en l’être humain, le domaine de la vie spirituelle autonome avec celui de la science et de l’art. Partant toujours de la connaissance, il élargit son action jusqu’à donner naissance à des réalisations pratiques dans des domaines aussi divers que la pédagogie, la médecine et l’agriculture, qui sont toujours présentes dans la vie contemporaine.

Il s’intéressa aussi à la religion, dans le but, non pas de créer une nouvelle religion ou une nouvelle Eglise, ce qui aurait été incongru et absurde. Il voulait seulement contribuer à soutenir la vie religieuse, en répondant aux questions de personnes qui souhaitaient, pour leur vie intérieure, disposer de connaissances directes des mondes supérieurs. »

Antoine Dodrimont s’engage dans les années 1980 dans le mouvement écologique. Il découvre l’œuvre de Steiner en 1983 et devient membre de la Société anthroposophique en 1985. Il devient enseignant à l’école M.Grunewald de Colmar (de 1990 à 2008). Il est président de la Société anthroposophique en France de 1999 à 2015